9 juin 2022

Nourrir plus que des ventres

Par allumefeu

La question des “régimes spéciaux” est souvent une grande question sur les camps. Qu’ils soient liés à des besoins de santé, des convictions religieuses ou politiques, des goûts, il peut y avoir au sein d’un même groupe une grande diversité de régimes alimentaires. Cette diversité est parfois un défi pour les personnes qui s’occupent de l’alimentation sur les camps, auquel les un·es et les autres font face avec plus ou moins de bonne volonté, de compréhension, voire d’enthousiasme !

RadioB, la radio du rassemblement pour les 40+1 du Hameau de Bécours des EEDF, s’est penchée sur cette question l’été dernier, en partant du principe que l’alimentation, c’est pas juste une question de nourrir des ventres, c’est aussi celle de comment on fait pour prendre soin du groupe et des personnes qui le composent. Retranscription d’une discussion enregistrée entre Claire et Delphine, deux passionnées d’intendance, qui ont clairement choisi le camp de l’enthousiasme:

C’est quoi votre approche du sujet ?

Delphine : j’essaie d’inverser la logique, c’est-à-dire de ne pas préparer pour des régimes “classiques” puis de penser ensuite aux végétarien·nes, sans lactose, etc. Donc à la place, j’essaie de voir si c’est possible de construire des menus qui vaillent pour tous les régimes, notamment sur les séjours courts.
Sur 5 ou 6 jours, on ne risque pas de carences majeures et ça permet aussi de faire des découvertes : pour les plats principaux, remplacer de la crème fraîche par des crèmes végétales, ça change pas le goût, ça permet de réduire la préparation d’un repas du côté de celles et ceux qui cuisinent.

Un prolongement de ça, c’est l’idée est de faire une base végétalienne pour tout le monde, et puis d’ajouter éventuellement des variations. Par exemple sur un équipage avec un enfant végétalien, un végétarien, et un qui mange de la viande : on peut avoir suffisamment de haricots rouges pour faire un seul repas pour tout le monde, et une autre fois ajouter un œuf pour le végétarien et celui qui mange de la viande.

Enfin, je joue beaucoup sur la découverte : sur un séjour on découvre beaucoup de choses, et donc aussi des choses sur l’alimentation.

Claire : un enfant qui mange bien et qui prend plaisir, il passe un bon camp, même si le grand jeu est raté. Dans cette logique, c’est important pour moi de trouver un équilibre entre cette découverte dont tu parles et les habitudes, pour ne pas être trop déstabilisé.

Quelque part, on pourrait dire qu’il n’y a pas vraiment de régimes spéciaux, y a les habitudes alimentaires de chacun : ça amène pour moi l’importance de discuter avec tout le monde au début du camp, aussi parce que les régimes spéciaux peuvent être différents : sur du sans lactose ou sans gluten, parfois c’est possible à petite dose, ou “pour craquer” sur un gâteau super bon. Savoir ça permet aussi de dire côté intendance, sur tel repas ce sera un plat unique pour tout le monde, ou là je sais qu’elle va en manger exceptionnellement, mais le lendemain, il y aura deux plats différents. L’idée c’est aussi de me faciliter la tâche en réfléchissant comme ça.

C’est vrai qu’au début, la multiplication des régimes alimentaires, ça m’a bousculé, il a fallu s’y faire. Ça demande effectivement de l’adaptation et plus de temps, mais disons que ça devient normal de le faire, donc on s’organise aussi en fonction et quelque part c’est assez passionnant de réfléchir à cela et trouver comment faire pour que chacun se sente bien.

Delphine : Souvent pour les personnes qui n’ont pas l’habitude de cuisiner ainsi, ce qu’il manque c’est des recettes. Il faudrait que l’on partage davantage celles que l’on a et qui marchent en camp. Des éclés (“le cercle des gourmets oubliés”) ont travaillé sur un livret de recettes.
On peut aussi se dire que se former, respos comme enfants, à l’équilibre alimentaire c’est très faisable puisqu’on se voit toute l’année. Ne serait-ce que de dire que les légumineuses c’est important parce que si tu remplaces la viande par des petits pois, ça ne marche pas pendant une semaine, c’est sûr. Ça peut réintroduire une forme de jeu dans l’alimentation : le brownie vegan à la betterave ou les croquettes de haricots rouges, il y a un côté fun.

Est-ce qu’il y a des petits conseils à donner ?

Delphine : j’aime bien jouer sur le “au choix” : quand tu fais un buffet, des salades composées etc, chacun peut piocher et choisir en fonction de ses habitudes, de ses besoins ou de sa curiosité. Je vais aller vers ça pour les camps longs, de plus en plus. Y a des enfants qui savent que c’est bon de manger des légumes mais qui supportent pas de manger des tomates ou des concombres crus : sur un camp d’été ça revient quand même souvent, donc laisser de la liberté permet aux personnes d’adapter elles-mêmes. Étrangement, c’est ce qu’on fait souvent pour les petits-dej, mais ça semble plus rare pour les midis et soirs alors que c’est tout à fait faisable aussi.

Claire : le bon conseil, c’est le goûter végan, ça permet d’en avoir qu’un pour tout le monde. Pour des gâteaux par exemple, il faut parfois s’être entraîné avant, mais ça marche très bien. Et puis ça ne change pas forcément quelque chose qu’il y ait du lait végétal plutôt que du lait de vache.

Delphine : parfois, les options végan sont aussi plus pratiques. Par exemple, emmener des œufs ou du beurre en itinérance, c’est pas évident. Mais avec du lait végétal et de la maïzena, c’est jouable, et tu peux prévoir de la béchamel ou des crêpes !

Propos recueillis par Radio B.

Pour en apprendre davantage sur comment réduire son impact écologique à travers l’alimentation et en prenant plaisir à le faire, il y a le livret Z’écolo-miam : https://www.domainedelaplanche.org/wp-content/uploads/2021/06/Zecolo-Miam-good.pdf !